mehareesdemaryam
Les heures passent lentement. L'âne lèche le visage de Maryam en guise d'envoi d'eau bénite.
Maryam a un teint vert. L'âne hésite entre la médecine, les derniers sacrements, l'appel de l'exorciste, mais que peut-il faire dans ce désert opaque? Il donne l'alerte dans l'espoir d'être entendu d'Aziza ,d'un humain perdu dans ce tourbillon voire d'un animal lui-aussi apeuré, car pour un âne, la responsabilité d'une femme-enfant est trop lourde. L'âne s'agite tant que Maryam reprend connaissance sans pouvoir bouger. Elle ne reconnaît pas l'âne qui la frôle sans qu'elle le voit et hurle de terreur, revivant le cauchemar de l'agression. Secouée de spasmes, elle découvre l'âne auprès de qui elle dépose de plates excuses, mais l'âne n'a pas eu peur d'elle. Maryam tente de se lever : il fait nuit et le vent de sable l'étouffe. Elle se laisse tomber, désespérée et songeant : " C'est ma faute. J'ai réveillé les génies de la tempête". Depuis sa naissance,Maryam se sait coupable : elle a accepté ce jugement porté sur elle, et n'a pu se convaincre qu'il soit faux. " Pourquoi suis-je en vie? Je dérange tout le monde"...puis elle entend le lancinant : " maudit soit le jour où je t'ai engendrée". Oui, mais il y a Aziza, sa presque mère maintenant. Maryam parle tendrement à l'âne pour qu'il patiente jusqu'à l'aube où elle prend le risque de se mettre en route par amour pour Aziza.
Maryam désire aider Aziza qui se fatigue beaucoup pour aller chercher de la nourriture.
" Shuf, ya Aziza" : Maryam explique son travail à Aziza qui devine comment sortir de l'illettrisme
Aziza reconnaît les signes classés par Maryam, des signes identiques qui n'ont pas revélé leur secret. Maryam cherche les traces d'une autre écriture, le savant blanc lui ayant dit avoir comparé trois écritures pour trouver le sens. Maryam interroge Aziza : " crois-tu que je peux revoir le savant blanc?". Aziza hésite puis rit : "il est dans le marc de café et vos corps s'aiment à la folie". "Je ne sais pas quand il reviendra. Avec lui, l'amour sera doux et passionné". Les yeux de Maryam s'emplissent de larmes : " cela m'est-il permis? Je ne suis qu'une traînée utilisée par tous". " Maryam, tu n'es pas coupable d'avoir été agressée" lui répond Aziza bouleversée. " Si, c'est ma faute, surtout parce que mon corps a ressenti du plaisir". " Maryam, ne t'inquiète pas : ton corps s'est protégé durant les agressions. Tu as cédé et tu as eu du plaisir. Tu as agi avec intelligence et non par une faute." " Je veille sur ta sécurité : je te laisserai aimer le savant blanc. Au campement, tous pensent que tu es morte. N'as-tu pas tué ton corps?" " Ya Aziza, je ne pouvais que le tuer pour ne plus sentir. Je ne sens ni la faim, ni la soif, ni la douleur. Et toi?". " J'ai fait comme toi, Maryam. On m'a mariée avec un vieux qui ne pouvait pas me donner d'enfant". " Tu n'as pas cherché quelqu'un d'autre?" "Maryam, j'aurais été lapidée ". " Mais moi, je ne suis pas lapidée?" " Maryam, on te croit morte". " Ya Aziza, c'est un peu vrai ". "Il est mort ton mari?" " Oui, mais je suis âgée". " Maryam, j'ai honte de ne pas savoir lire et écrire. Peux-tu m'aider?". " Ya Aziza, je t'apprendrai ce que je sais. Je ne connais pas encore l'écriture de la montagne". "Où vas-tu dans la journée?" " Maryam, je vais chercher de quoi manger même si tu ne veux pas manger. Un jour, tu mangeras un tout petit peu quand tu n'auras plus peur". " Ya Aziza, je t'accompagnerai aujourd'hui". " Non, Maryam, pour toi c'est trop dangereux. Tu dois rester cachée. Tu es faible, fragile, squelettique : je sais que tu ne veux plus manger depuis que les trois hommes t'ont attaquée. Acceptes-tu de vivre pour m'apprendre à lire et pour attendre la visite du savant blanc?". Maryam caresse le sable ocre puis sculpte un couple s'unissant : "je ne peux pas encore vivre, mais quand le savant sera là, il me redonnera la vie, en aimant mon corps".
- Commentaires textes : Écrire
Maryam étudie les signes qu'elle découvre sur la montagne et se sent revivre loin des drames.
Maryam est grisée par la splendeur de la montagne aux écritures. Elle recopie les signes sur le sable, et compte leur fréquence. Maryam ne peut pas déchiffrer encore les textes mais devine qu'ils parlent de la vie, de la mort, de l'amour point qui l'intéresse pour savoir ce qui se passe hors du viol dont elle connaît tous les secrets y compris cet étrange plaisir de la femme qui doit lâcher prise pour ne pas être démolie par l'agresseur. Maryam se souvient très bien du savant blanc qui lui avait parlé d'une pierre de rosette ( c'est joli comme une rose) et d'un nom comme champion, parce qu'il était sûr que celui qui avait découvert l'écriture égyptienne était un champion. Aziza était heureuse de voir Maryam se détendre : elle avait eu si peur de cette jeune femme dont le regard était fixé sur la tombe, non pour croiser celui de Caïn mais pour guetter une issue à une existence trop dure. Aziza avait tout compris en lisant dans le marc de café et elle éprouvait une intense compassion pour Maryam, s'étant écrié : " Ya Maryam, much maoul,. Enti mut" (Maryam, ce n'est pas possible. Tu es morte). Maryam se transformait en professeur pour Aziza illettrée, l'initiant en premier à un alphabet inconnu, en vertu du principe que qui apprend le plus difficile saura d'emblée ce qui est donné au commun des mortels. Au fait, qu'est-ce que le commun des mortels? Maryam a entendu des histoires de barques pour le séjour des morts dans les propos du savant blanc, mais ne comprend pas comment cela peut signifier quelque chose dans le désert. Elle est près d'El Oued en Algérie et non en Egypte. Les morts ne partent pas en chameau? Le blanc n'est plus là : son histoire est très compliquée. Maryam crut comprendre qu'il évoquait l'existence d'une autre vie pour les morts dans un lieu où tous s'aiment. Impossible de faire gober cela à Maryam. Son étude s'intensifie : elle trouvera le code secret, le mystère des messages, les lois de la vie heureuse ....Mais Maryam est heureuse dans son rôle d'explorateur, fut déroutée par les violeurs, ne le fut pas par la tempête de sable. Elle a anesthésié son corps et cultive son esprit.
La montagne aux écritures, refuge d'Aziza et de Maryam
Lire les commentaires textes
J'ai lu tes écrits même si je ne laisse mon empreinte qu'ici .c'est beau , trés beau ..Je ne peux te dire de continuer c'est si dur d'écrire sans être sûr d'être lu et je vois ici si peu de commentaires que je crains que tu ne te lasses d'écrire.Si je pouvais te donner un conseil, je te dirai écrit au présent pour penser à l'avenir...Ne pense plus au passé , il est mort et enterré .JE T'embrasse